26 novembre 2006

Ma première soirée charité au Rotary Club


Dans la vie, il y a des premières fois plus souvent que des deuxièmes : c’est mathématique. La première fois que je vais vous présenter a eu lieu il y a quelques jours : ma première soirée de charité du Rotary Club.

Mais que faisais-je au Rotary, moi, petit-fils spirituel de Jaurès, lecteur assidu des Inrocks et sociétaire Maif ? Ce serait à la fois long et ennuyeux à expliquer, comme quand on est au cinéma accompagné de quelqu’un qui veut à tout prix attendre la fin du générique, alors que vous attendez de vous dégourdir les jambes et voir si la nuit est tombée pendant la séance.

Le but de la soirée était d’assister à un concert de Jazz. Après le mot d’accueil de rigueur, ponctué des hommages aux derniers disparus, on a ainsi vu déambuler une bande de vieux gaillards qui ressemblait au conseil d’administration de mon entreprise : 6 cinquantenaires, costumes beiges à carreaux, cravate rouge et pantalon dépareillé, qui jouaient du jazz des années 50 et m’ont rappelé mes belles années en Noir & Blanc sur le fleuve Mississipi, quand je chiquais du tabac à la recherche d’un bon filon d’or.

A la pause du concert (oui, les jazzmen font des pauses, comme un match de football), la grande famille rotarienne se retrouvait dans le hall pour discuter des dernières nouvelles. Heureusement, beaucoup de gens se connaissaient, et personne n’est venu vers moi « Alors, comment se porte ton patrimoine immobilier ? » ou encore « tu connais la dernière histoire du tribunal du commerce ? ». Une grosse dame blonde, très charismatique, butinait de petit groupe en petit groupe, distribuant des cartes de visite mais aussi des bons mots, un peu familiers mais pas vulgaires : « Alors Gérard, on fait le dindon ! », ou encore « très doués ces musiciens pour des retraités ! ».

Parmi ces gens, je retrouvais tous les clichés de la classe sociale des notables :
•un préfet très vieux en costume en train de mourir, ancien colonisateur en Afrique ou dans le Nouveau Monde…
•des jeunes loups aux dents longues d’écoles de commerce, mèche sur le côté, cravate fine, gendre idéal de Christine Boutin
•des blondes plus très fraîches souriant à l’interlocuteur de leur époux, regrettant peut être d’avoir choisi le mauvais cheval
•un médecin, mais sans stéthoscope, donc médecin à l’hôpital ou en clinique

La liste est encore longue, tout comme le fut le concert. Il faut dire qu’un joueur de jazz se repose souvent durant le solo de ses comparses : il pose son instrument, rigole avec un copain… Ah ça, ils ne sont pas aussi dynamiques que la fanfare de l’usine !

19 novembre 2006

Mise à jour

Pas trop de temps ces derniers jours pour me faire l'écho d'une discussion surprise dans le métro ou pour défendre le droit à une soirée anniversaire de la mort de Darry Cowl sur M6, au moins. Alors pour la mise à jour de blog, imaginez dans les lignes qui suivent une rencontre avec un ancien instituteur, type Mme Piochard, la prof de CP, dont vous reviennent en mémoire quelques détails comme son disgracieux visage son odeur désagréable ou la taille démesurément excessives de ses pieds. Ensuite, imaginez vous en train de dialoguer avec elle devant votre boulangerie préférée un dimanche matin (ces matins un peu honteux où on va chercher un croissant avec un jeans enfilé sur le pyjama). Elle passe par là pour voir son petit neveur ou écouter le sermon de son prêtre préféré et vous demande si vous avez enfin appris votre table de 3. Là, à vous de jouer et de créer votre propre discussion : le quartier qui est sympa avec ces petites adresses que même le Nouvels Obs dès fois il en parle, le métro ou le tramway qui n’avance plus et la politique, où il s’en passe des choses ; mais prenez bien garde de ne pas adopter un discours partisan pour ne pas choquer votre interlocutrice sans toutefois sembler trop larguer dans le débat politique pour ne pas que celle-ci profite de la brèche pour défrendre l’extrême droite (oui, on sait combien les gens vieillissent mal dans ce pays). Enfin, n'oubliez pas de glisser un mot sur votre parcours depuis le CP. Bon courage, je releve les copies à la fin de l’exercice.

08 novembre 2006

Le petit chauve

Encore une histoire de métro. Un matin, dans la rame bondée du métro n°13, un petit chauve avait trouvé refuge sous mon nez. C’est drôle le crâne d’un chauve quand on le regarde très près. D’abord, il n’est pas totalement vierge de cheveux, il y en a quelques uns dispersés au hasard sur le crâne. On pourrait les compter. Et puis ils font pas la même longueur, à croire que chacun pousse à son rythme. Ici, un lent, là, un rapide. J’ai fini par en voir un qui faisait 15 cm de long. Comme une queue-de-cheval, mais à un cheveu. Pendant tout le trajet, je n’ai vu que ce cheveu, survivant solitaire d’un désert capillaire, qui se trémoussait selon les vibrations du métro. J’ai eu une sacré envie de lui arracher, ce cheveu, comme tous ces types avec une queue de rat ou une coupe de footballeur des années 80, et qu’on regrette ne pas être Edouard aux mains d’argent, pour couper tout ce qui dépasse ! Ca démange !!

06 novembre 2006

Blackberry a dit...



Ce soir, j’ai pris le métro, comme des milliers (des millions ?) de parisiens. Je me suis retrouvé je ne sais comment dans un fauteuil coincé entre trois collègues, deux hommes la quarantaine triomphante, sourire colgate, mèche arrogante, souliers neufs, accompagnés d’une vieille femme. Ca devait être des ingénieurs, ils ont parlé longtemps ! J’en ai entendu des trucs.

- Michel Granier, il ne lit pas ses mails !
- Non, il a paramétré Lotus Notes pour mettre en rouge que les mails de son chef.
- Ca sert à quoi d’avoir des mails si ce n’est pas pour les lire ? On filtre avec un téléphone, pas avec Lotus !
- …
- Tiens, je suis allé au cinéma ce week end, voir un film
- Ha ?
- Ha ? (la femme)
- Oui, « Ne le dis personne », de Guillaume Canet, avec François Cluzet et un grand type avec des moustaches énormes qui fait toujours des rôles de flic.
- C’est pas Jean Rochefort ?
- Non, lui je le connais.
- Attends, bouge pas, on doit capter ici
Il sort un blackberry
- Pof pof pof…
- … tu peux aller sur Internet, c’est pas bloqué ?
- Tu rigoles ! Tiens, c’est pas François Berléand ?
- Wé, ça doit être ça
- Oui, il joue dans beaucoup de films (la femme) ( ? point d’interrogation entre paranthèse aussi parce qu’on a pas vraiment su si c‘était une question ou une remarque. C’était une phrase …)
RIIIRIRIRIRIIRIR (le métro passe au trocadéro)
- …
- Sinon ma femme accouche le 12 !
- T’es sur ?
- Et comment ! Le 12 y a neuf mois on était en déplacement à Berlin (NDLR : ???)
- Mais t’es sur que c’est neuf mois ? Parce que le nombre de jours dans le mois n’est pas fixe, ça change…
- Oui, c’est vrai (la femme)
- Par contre, ça doit faire un nombre fixe de semaines. Attends, on va compter
Il ressort son Blackberry
- Pof pof pof… je lance Excel… Y a une fonction qui compte le nombre de jours
- Ne comptes pas que les jours ouvrés, hi hi hi (la femme)
- Alors ca fait 257 jours, soit 36,75 semaines.
- C’est pas possible, c’est forcément un nombre entier
- MMmm (le type du blakberry prend son air le plus grave)… Ca colle pas.
- T’es certain des jours ?
- Oui, c’est Excel, d’accord, pour un smartphone, mais quand même, il ne peut pas se planter. T’es sur de ta date ?

Hélas, mille fois hélas, j’étais arrivé à destination et quittais ces trois larons. Je ne serais jamais qui est le père de l’enfant et je ne comprenais pas pourquoi un blackberry n’était pas capable de le dire.

03 novembre 2006

Sacré Virenque !

Il y a quelques années, je faisais un stage dans une entreprise spécialisée en Relations Presse, à grands coups de verres de champagne, de strass et de paillettes…

J'ouvre une parenthèse ( : quelqu'un sait ce qu'est du strass ? Tout le monde en parle, sans savoir ce que c'est vraiment, jusqu'au jour où on sort ce mot dans le mauvais contexte, comme « tiens, tu te prends pour un strass toi ! ». La c'est la honte assurée, et ce sera votre tour pendant des semaines d'aller réserver les salles de réunions auprès de la terrible secrétaire du service, qui te dira au moins dix fois « la clé ! N’oubliez pas de me rendre la clé ! C’est toujours pareil avec les gens de votre age»)

Bref, ce jour là je devais faire tout un tas de trucs épuisants de stagiaire : distribuer les badges, servir du café à mon chef, aller acheter des piles à la superette du coin, regarder de loin seulement les hôtesses d'accueil, me faire engueuler pour rien…

La société qui m'employait organisait une grande conférence de presse pour le lancement de la saison cycliste : on avait convoqué tout le gratin des journalistes sportifs pour faire la présentation de cette nouvelle équipe : l'équipe, vélo mag, VTT mag, ils étaient tous là. Sur le podium, les cyclistes en tenue exhibaient fièrement leurs cuisses, grosses comme deux fois leurs torses, et répondaient avec grande difficulté aux questions des journalistes.

Après cette longue journée, je retrouvais les cyclistes à l'hôtel IBIS de la Porte d'Italie pour un dîner plein de pâtes. C'est fou ce qu'un cycliste mange comme pâtes, y compris quand il n'a rien fait d'autres que de dire à des journalistes que oui, son rêve c'est de gagner une étape du Tour de France mais qu'il ne faut pas oublier les classiques, ou que non, il ne se dope pas et que de toute façon il ne sait même
pas ce que cela veut dire.

Une fois le dîner terminé, tout le monde se dirige le plus naturellement du monde vers le bar. Là-bas, je me mets à discuter avec quelques pousses-pédales. En fait, il n'y a pas qu'aux journalistes que ces paires de cuisses ne savent pas parler. Ils n'ont aucune conversation. Je les sens tendu, j’essaie alors de les détendre en proposant une tournée de bière. Mais mes dopés daignent m'accompagner d'une bonne mousse, pour s'accouder au bar et siffler quelques touristes italiennes passant au loin. Dommage, je me voyais déjà au milieu d'eux réunis en cercle autour de moi, à raconter mille exploits extra ordinaire. Mais non, au lieu de tout ça, ils m'ont répondu : « bon, on va dormir… ». IL devait être dix heures du soir… et voilà presque seul au bar de cet hôtel un peu miteux… Le barman à l’air compréhensif et sert une mousse à boire tout seul (barman, qui, dans mes souvenirs, est habillé d'une veste rouge, frotte quelques verres d'un torchon blanc, est coiffé d'une grosse coupe afro, avec, je ne sais pas pourquoi, un petit singe qui se promène sur ses épaules).

C'est alors que se dirige vers moi ce type. Vous savez, dans les cocktails ou les soirées, ce genre de moment arrive souvent trop vite. Vous êtes seuls et vous croisez le regard de quelqu'un dont vous savez la compagnie pénible, mais c'est trop tard, il est déjà là, à vous dire un truc dont vous déjà discuté avec un voisin, un boulanger ou un chauffeur de taxi : la météo, les hôtels à Paris, ou mieux, le dopage…

« Alors, on découvre le vélo ! ». Mais là, stupeur, ce type, c’est Daniel Mangeas, le speaker officiel du Tour de France. Vous ne connaissez pas sa tête, mais sa voix. Depuis des décennies il écume les villages et communes d'à peine 5000 habitants en quête de notoriété, pour animer les arrivés des courses, par tout temps et toute saison.

Alors il me parle de ses passions, le vélo, puis le cabaret spectacle. Daniel organise des événements. Il utilise sa notoriété (très forte dans le monde agricole) et son réseau (il connaît tout le peloton) pour mettre en place des critériums. Mais voilà, depuis quelques années, Virenque est devenu plus cher que Shirley et Dino, le duo qu’on voit souvent chez Sébastien (la scène décrite a quelques années), alors Daniel dorénavant organise des soirées cabarets dans des villages. Il transforme une grange en restaurant luxueux, invite tout le gratin local (curée, élus, notaires, médecins…) et donne à Shirley et Dino une occasion en or pour renforcer leur notoriété face à un public gonflé au mauvais vin local qui paie chèrement sa place. Alors Virenque…