J’ai vécu hier soir ma première a réunion de copropriété. Le principe est simple, réunissez dans une petite pièce mal éclairée vos voisins les plus aigris et les plus vieux, mélangez le tout avec un gérant qui est le véritable souffre douleur de tous les co propriétaires, faites durer la réunion deux longues heures, et vous obtenez une expérience jamais vécue.
Parmi les participants, on a plusieurs clans :
- > les vieux propriétaires occupants aigris, qui se plaignent des odeurs des soupes de poireaux, du bruit dans l’escalier et de la mauvaise humeur de la gardienne.
- > les vieux propriétaires bailleurs, qui ont un locataire dans l’appartement. Ils se reconnaissent et font de nombreux commentaires entre eux « Ca se passe pas pareil dans mon immeuble à Levallois ». Et puis surtout, ils ne veulent rien dépenser « Pas de tapis dans l’escalier, ils n’ont qu’à faire attention en descendant les marches !! »
- > Les moins vieux : ils sont propriétaires de leur appartement, viennent à l’AG parce que c’est une contrainte annuelle, et prennent des notes sur les échanges entre participants pour alimenter un billet de leur blog…
Point n° 1 à l’ordre du jour
─ Tout le monde se connaît ?
─ Non, vous ne connaissez pas ! La dernière fois que je suis venu, c’était à l’assemblée générale de 1991 !
Ca déjà commence fort, grâce à M. Santos. Personne ne connaît son age, on sait seulement qu’il est propriétaire depuis 1931 de son appartement. C’est propriétaire bailleur, parmi les plus radins. Il respire fort, parle très fort, porte des bretelles, des chaussures dépareillées et sa veste trop grande, trop grise et trop usée lui donne un air de quelqu’un échappé de l’hospice. Il va s’amuser toute soirée à lancer des piques au gérant en prenant à partie les autres propriétaires et à se targuer de comment il a augmenter ses loyers dans ses différents appartements.
Point n° 5 à l’ordre du jour : les copropriétaires du 3ème porte gauche ne paient plus les charges depuis dix ans.
Mlle James, du haut de son vieil age, tonne : « Je vais pas encore payer pour les autres !
─ Oui, enfin, c’est pareil pour tout le monde, réponds le gérant. On avance leur charge en attendant d’être remboursé par le tribunal plus tard.
─ Plus tard ? J’ai plus longtemps à vivre, moi !
Point n° 7 à l’ordre du jour : validation des comptes
─ En tant que syndic, vous n’avez pas le droit d’être débiteur ! (M. Santos)
Le gérant : Oui, mais je jongle avec la trésorerie
M. Santos : mwé ! Attention, je suis quand même un ancien confrère ! Je connais toutes vos ficelles ! Je vous ai à l’œil !
Point n° 13 à l’ordre du jour : bilan sur les travaux de peintures dans l’escalier
M Gomez (c’est un peu le monsieur technique de la copropriété, il surveille les artisans, contrôle les devis pour le conseil de copropriétés) : « On va pas payer le peintre, pas pour le travail qu’il a fait ! »
Le gérant : Oui, enfin, le conseil de copropriétés a signé le devis
M. Gomez : Vous me prenez pour un mauvais payeur ! Le peintre n’a qu’à faire son travail, et on en reparlera !
Point n° 17 à l’ordre du jour : mise aux normes des parties communes
Le gérant : Les vitres de l’escalier ne sont pas aux normes. Il faudrait mettre des vitres en verre sécurité.
Une dame énervée du 1er : Oh ! Mais arrêtez avec votre sécurité, on va pas sortir avec un casque dans la rue non plus !
M. Santos : Attention, il a quand même raison : une gardienne qui se blesse, un accident de travail, ça coûte très cher, très très cher, et on se retrouve rapidement à Nanterre, au tribunal ! Et notre gardienne pourra se blesser rien que pour nous emmerder !
Le gérant : et des gardes corps sur les vitres ?
Mlle James : Oui, bonne idée, on avait des volets avant côté cour, avant le bombardement !
Point n° 21 à l’ordre du jour : Dératisation de l’immeuble
Mlle James : Il faut faire quelque chose contre les cafards ! Il y en a partout !
M. Gomez : Mais non, on a tout fait pour se débarrasser des cafards l’an passé !
Mlle James : Oui, mais à la télévision, ils ont dit de se méfier, et puis il y en avait plein le poste !
Point n° 27 à l’ordre du jour : Mise aux normes de l’ascenseur
M. Santos : Les ascensoristes, c’est une véritable mafia ! Ils cassent les prix pour les immeubles à la Défense, mais nous, petits propriétaires (sic) ils nous étouffent ! C’est une vraie pègre, et moi je ne les aime pas beaucoup ! Appeler Rigodin, un petit ascensoriste du 15ème à Paris, lui, il n’est pas trop mal !
Vers 21h, l’ordre du jour étant épuisé, chacun fut libre de regagner son chez lui. Sur la route, Mlle James glissera à M. Gomez que les nouveaux propriétaires ont l’air curieux, ils n’ont rien à dire, mais le jour où ils feront la fête, là, on les entendra toute la nuit !